Article - La Gratitude

Nous étions en formation, il y a de nombreuses années. Je traversais alors une période un peu déroutante dans mon aventure de facilitatrice de Biodanza. Je faisais de mon mieux. Je donnais le meilleur de moi-même. Pourtant, je me sentais seule. Je m’en suis ouverte à Rolando. Me prenant les mains, et plongeant son regard dans le mien, il me dit ce qui allait constituer un ébranlement de beaucoup de mes protections : « Celui qui sait recevoir n’est jamais seul, hijita. » 

Je faisais tout pour mériter d’être reconnue. Me reconnaissais-je ? Recevais-je vraiment ce que j’avais déjà ? Recevais-je ce que j’étais déjà, avant tout mérite et encore au-delà ?

Le don de la vie ne se mérite pas, il est gratuit. Que faisons-nous de ce don ? Comment valorisons-nous le don de voir ? Celui d’entendre ? Celui de savourer ? Celui de humer les senteurs du monde, de recevoir une caresse ?

Lorsque nous comprenons – dans le sens de contenir en soi – le Principe Biocentrique, nous éprouvons le bonheur d’être vivant et accueillons chaque jour avec joie. Cependant, il faut parfois un long chemin pour comprendre. Ou alors un brusque virage sur le chemin. Il faut l’autre.

Par-delà l’idéal, les idéalisations, les préférences et autres critères sélectifs, tous les êtres humains, connus, inconnus, proches ou lointains sont le terreau de notre identité. Leurs œuvres, leurs créations, leur cheminement résonnent dans nos propres pas. La gratitude envers nos semblables met un terme immédiat au sentiment de solitude.

La gratitude est un antidote efficace au ressentiment que nous pouvons entretenir dans nos cœurs et qui ternit notre perception. Elle nous libère de l’apitoiement dans la mesure où elle transforme ce qui pourrait ressembler à de la résignation, en acceptation, en adhésion à tout ce qui est.

Elle nous saisit tout entiers lorsque nous sentons, profondément et sans réserve aucune, que tous les pas que nous avons posés sur notre chemin, toutes les expériences – nos errances, nos erreurs, nos rencontres, nos choix…tout – traduit une seule réalité : nous sommes toujours au bon endroit, au bon moment, c’est-à-dire, ici et maintenant.

Ce sentiment de gratitude se nourrit d’une sagesse intime et profonde : tout est passage. Tout est transitoire et échappe au contrôle si réduit et si réducteur de notre conscience et de notre volonté.

La gratitude est un abandon à la sagesse bien plus vaste du flux de la vie, dans lequel le projet individuel, personnel, n’a plus de sens. La gratitude n’est plus assujettie à ce que nous obtenons pour nous-mêmes en termes d’acquisition ou de propriété (biens, personnes ou qualités). Elle n’est pas le fruit de l’avoir. Cette gratitude ne résulte pas non plus d’attributs ou autres qualités qui semblent nous définir. Car cela aussi est transitoire : notre apparence, notre âge, notre humeur…. Ce que nous avons la tentation de définir par « qui nous sommes ».

Cela, je l’ai appris et compris lorsque celle que l’on nomme « la maladie » est venue me parler. Elle m’a invitée à m’interroger sur ce qui me faisait courir pour rattraper ce qui n’est pas encore, ou pour fuir ce qui n’est plus. Elle a exigé de moi que je m’abandonne à ce qui échappait à mon contrôle. Je me suis alors sentie nue : sans attributs et sans armes.

Chairs ouvertes, il n’y avait plus qu’à laisser partir toutes les définitions d’un « je suis » et recevoir le souffle de l’Être. Je me suis souvenue que dans la langue hébraïque, si symbolique, le verbe être ne peut se conjuguer à la première personne du présent. Sa sémantique m’interdit d’accoler quelque qualité que ce soit à un « Je ». Par contre, elle m’ouvre l’immensité du champ de l’action.

Le Verbe est action. Aujourd’hui, Je reçois, j’aime, je remercie, Je Vis !

Prochaines activités

Mai 03

Music Semantics in Biodanza

3 mai à 19:30
5 mai à 17:30
Mai 24

Antécédents Mythiques & Philosophiques

24 mai à 20:00
26 mai à 17:30
Mai 31

La Sagesse Source de la Vivencia

31 mai à 18:00
2 juin à 19:00

Partages récents

Catégories